Comme chacun sait, le monde des amateurs de sports d'hiver se divise en deux camps : celui des détenteurs de forfaits saisonniers et celui des "roadtrippers". Les premiers habitent généralement à proximité relative de telle ou telle station de ski et se laissent volontiers aller à l'ennui occasionnel d'un engagement ferme, tandis que les seconds sont volages et déloyaux - toujours à la recherche du spot parfait avec les conditions parfaites. La semaine dernière, la météo a légitimement provoqué des remous dans les deux groupes. Les détenteurs de cartes de saison des Alpes du Nord ont observé le ciel en se rongeant les ongles, espérant que l'effet de barrage du nord prévu arriverait enfin. Pendant ce temps, les roadtrippers s'essayaient à des prouesses logistiques et à des compromis coût/bénéfice efficaces entre le temps de trajet à travers les Alpes et les quantités de neige fraîche des deux côtés.
Le jet fait la pluie et le beau temps
Dans les latitudes moyennes de l'hémisphère nord, en d'autres termes dans les Alpes, le temps est déterminé en grande partie par la position du jet stream : Une bande de vents forts dans la haute atmosphère qui se forme à la limite des masses d'air entre l'air froid polaire et l'air chaud subtropical. Cette bande n'évolue pas de manière uniforme autour du globe, mais dans un mouvement ondulatoire plus ou moins irrégulier, dans le sens de la rotation de la Terre (ouest vers est). Dans les vallées d'ondes (auges) remplies d'air froid qui en résultent se forment des zones de basse pression et des systèmes de fronts qui s'y insèrent. Le facteur décisif pour les situations de barrage si intéressantes ces derniers temps est toujours la direction du courant, la direction dans laquelle les nuages de neige atteignent les montagnes. Si nous nous représentons l'auge comme un U posé sur les Alpes, l'air s'écoule le long de celle-ci, en principe d'abord vers le sud, puis vers l'est et enfin vers le nord. Ainsi, dans les régions situées à l'avant de l'auge (côté droit du U), il se produit un stau sur le côté sud des Alpes (l'air "remonte" le U), ce qui s'accompagne souvent de foehn au nord. Il est plutôt rare que des situations météorologiques opposées se succèdent rapidement et aient un effet aussi positif sur l'enneigement en tous lieux que les événements de ces derniers jours. La plupart du temps, seul un côté reçoit quelque chose, tandis que l'autre reste bredouille et regarde tout au plus avec envie par-dessus la crête principale des Alpes pendant que le foehn fait rage. Que s'est-il donc passé ? Un coup d'œil sur les cartes météo nous en dit plus.
Les précipitations de barrage de la semaine dernière
Sur l'image, on voit la raison pour laquelle le MSP et le TGR ont tourné simultanément à Alagna à partir du week-end du 7 et 8 février : L'Italie occidentale se trouve à l'avant de l'auge, exactement dans un fort courant d'air du sud.
Trois jours plus tard, sur la carte du mardi 10 février, nous voyons comment cette dépression s'est déplacée vers l'est : elle se trouve maintenant sur la Grèce et la Turquie. Pendant ce temps, une nouvelle dépression s'est déplacée du nord de l'Atlantique vers le sud-ouest, au-dessus de la France. Notre U a perdu un peu de sa forme, ou plutôt nous avons deux U qui fusionnent. Les Alpes se trouvent clairement dans un courant d'ouest (l'air s'écoule vers l'est). Dans les situations de barrage correspondantes, comme par exemple les petites régions de treeski en Valais, qui ne portent pas de nom, il neige maintenant abondamment.
Cette nouvelle dépression s'étend ensuite de plus en plus vers le sud, tout en continuant à se déplacer vers l'est. Les Alpes se retrouvent lentement à l'arrière de la dépression, c'est-à-dire sur le côté gauche du U, et dans un courant d'air du nord (l'air descend le U). L'effet de barrage du nord est là !
Un hiver riche en neige au sud
Cet hiver, le sud brille avec des quantités de neige comme on n'en avait plus vu depuis des décennies. Une série de dépressions méditerranéennes et de situations météorologiques dans lesquelles le U susmentionné se situe relativement loin au sud-ouest offrent aux stations de ski, de l'ouest de l'Italie jusqu'aux Karawanken, un dump monstre après l'autre. En revanche, lors de l'hiver record 2005/2006, il y a eu une série apparemment interminable de situations de nord-ouest et le versant nord des Alpes s'est retrouvé sous la neige. On ignore en grande partie comment de tels modèles à grande échelle se forment. Ce qui est sûr, c'est que dans certaines limites, les chances de neige sont meilleures lorsqu'il y a déjà de la neige. Ainsi, une épaisse couche d'inversion se forme plus facilement, surtout dans les vallées. Si de l'air humide provenant d'un front chaud glisse sur cette couche, il ne neige pas seulement plus bas, mais généralement aussi nettement plus. Sinon, il ne reste plus qu'à dire : assez de théorie, le temps fait de toute façon ce qu'il veut. Le prochain creux avec un grand potentiel de barrage du nord est dans les starting-blocks et il est temps d'utiliser les cartes de saison ou de commencer un roadtrip. Celui qui ne vient pas au bon moment doit conduire ce qui reste !